la fille au canevas
Els
a.
S
Elsa S.
Ma démarche
Des récupérations fortuites au coin de ma rue pour des essais créatifs hasardeux, en plaisir de glaner pour dénicher quelques objets à réinventer est né un véritable engouement pour les rebuts de chacun, les produits usés qui n'ont plus d'utilité ou démodés, tout ce qui est mis de côté, relégué, délaissé voire abandonné. Cette attirance s'inscrit également dans un goût pour le désuet, le décalé et le plaisir de renouer avec les objets ou meubles du "passé".
Tous les moyens d'y parvenir sont bons : arpenter les rues à la recherche d'encombrants, chiner dans les brocantes et vide-greniers, parcourir les associations Emmaüs ou Secours Populaire, les ressourceries ou encore surfer sur la toile sur des sites de vente d'occasion...pour se constituer un véritable bric-à-brac personnel, véritable source d'inspiration!
Mais cette passion s'affirme aujourd'hui comme un choix déterminé pour recueillir et transformer ce qui serait perdu ,et s'ancre dorénavant dans une démarche éthique d'alternative à la société d'hyper-consommation et de protection de l'environnement : la volonté d'éviter de jeter ou gaspiller inutilement, de limiter sa consommation en réutilisant, et de faire sienne la devise de Lavoisier "rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme " et pour bientôt de l'adapter "tout doit doit se transformer"...Bref je fais le choix d'une démarche eco-responsable.
Avec la pratique du recyclage ou upcycling" ou "surcyclage", je récupère des meubles, objets, accessoires dont on a plus l'usage et cherche à leur donner un souffle nouveau et à les revaloriser. Cette transformation passe en premier lieu par une remise en état : lavage, traitement des meubles abîmés avec des produits insecticides, éventuel ponçage ou décapage des vieilles cires, du vieux vernis, ou des anciennes peintures, ensuite application d'une nouvelle couche de cire , peinture, ou vernis selon les cas...
Mais cette renaissance de l'objet ne se limite pas à une simple rénovation, elle inclut également une démarche esthétique et créative avec la volonté de les voir d'un autre oeil et de les customiser afin d'en faire une pièce unique par le choix de la décoration, Cette transformation d'objet en vue d'une création me projette à nouveau avec grand plaisir dans les expériences et les recherches réalisées lors de mes études d'Arts Plastiques.
Ce choix de personnalisation de l'objet pour lui donner une autre chance, le revisiter, se l'approprier et le rendre original se centre aujourd'hui principalement sur le canevas !
Elsa S.
Pourquoi le choix du canevas ?
Le choix du canevas se marie avec la volonté de recycler d'upcycler les matériaux, d'allier le passé et le présent, de faire du neuf avec du vieux : remettre au goût du jour une oeuvre surannée en la détournant de son usage premier (le tableau), en la sortant de son cadre et en la transformant (recadrage, peinture...) pour la transposer sur différents supports (meubles, valises, malles, paravents, objets, sacs, paniers, bijoux, chaises etc...) pour des créations originales !
Sachant que le canevas est une oeuvre artisanale, témoignage d'une passion, d'une habileté et d'une grande patience, il peut être considéré comme l'empreinte dans le temps d'une personne. A ce titre il me plaît donc de l'intégrer dans mes créations pour mêler une fois de plus passé et présent et faire subsister des traces du passé, des souvenirs d'un savoir-faire ou d'une personne, pouvant être parfois empreints pour certains d'une charge émotionnelle ou affective.
Et c'est précisément le cas des premières expériences créatives qui m'ont amenée à utiliser le canevas comme médium artistique. Le point de départ de ces essais créatifs était la récupération de deux canevas à valeur sentimentale de mes deux grand-mères disparues, précieux souvenirs qui me tenaient tellement à coeur :
-"les glaneuses" de Millet, tapisserie cousue sur un coussin que je garde affectueusement niché dans un fauteuil à sa mémoire.
"Les glaneuses"
- 'les anémones", tapisserie encadrée dont je ne savais que faire telle quelle, l'ayant tellement vu accrochée au mur depuis des années dans le salon de ma grand-mère, mais dont je ne pouvais me détacher... me vient alors l'idée de m'en servir pour décorer un meuble avec et l'intérieur d'une valise pour ma soeur pour que ces traces du passé et d'êtres chers survivent ou renaissent à nos côtés !
Les anémones
Une fois ces réalisations achevées, j'ai eu envie de poursuivre sur ce chemin à la découverte de nouveaux canevas dégotés de ci de là...
Et au fil des canevas, je deviens fan : le gout du kitsch, du vintage, du décalé se prononce.
J'en parsème quelques touches chez moi, à mon bras...
...ou sur mes canapés...oeuvres souvent sentimentales témoins d'un passé, léguées par des particuliers avec parfois une pensée émue pour la Dame, une proche souvent, aux doigts habiles qui les avait réalisées ...passage de relais...
La quête continue et je finis par établir une véritable collection dans mes coffres et valises, et puise dedans pour trouver l'inspiration pour décorer les meubles...
Elsa S.
J'aime me plonger dedans.
Portraits, bouquets, animaux, scènes, tableaux de maître, paysages , autant de motifs variés qui vous embarquent dans une balade poétique, vous raconte une ou plusieurs histoires et vous invitent à la rêverie , au voyage...
Elsa S.
La lessive des canevas au grand air est l'instant sacré que j'affectionne particulièrement : les sortir de leur cadre étriqué, les laver pour les débarrasser de ses années de poussière passés au mur et leur redonner vie et couleur, les faire sécher à l'air libre, leur rendre ainsi provisoirement une certaine liberté...
Ce moment constitue pour moi une véritable source d'inspiration en vue de les sélectionner pour les assembler avec un meuble ou un objet récupéré.
Ce qui justifie également le choix du canevas dans mes collages d'aujourd'hui, c'est à mes yeux l'attirance pour la matière même du canevas, sa trame et son point
que je tente de mettre en valeur avec la technique du collage et du vernissage, et qui viennent s'ajouter et se confronter à la matière du support (tressage de l'osier, veines du bois, bordures métalliques etc...).
Lors de mes études en Arts Plastiques, j'ai toujours adoré la matière en peinture ou le grain d'un cliché en photographie , ainsi que la position macro qui permettait de voir de façon différente ce qui nous entoure en faisant apparaître soudainement des compositions faites de points et de couleurs où le motif disparaissait derrière une certaine abstraction.
Or la colle et le vernis que j'applique sur le canevas pour le transposer sur un support mettent en évidence les points de coton ou de laine du canevas en les figeant, les cristallisant voire parfois en les mettant en relief. La trame ainsi solidifiée semble plus apparente et fait penser parfois à du pixel art...
Mais la technique du vernis-colle appliquée sur des canevas a tendance à foncer le canevas et nécessite donc parfois une retouche à la peinture acrylique pour le rehausser quand c'est nécessaire ou pour ajuster les couleurs et les valeurs de l'ensemble et harmoniser le tout.
J'apprécie également beaucoup cet apport personnel avec cette touche finale picturale, et tout le travail de précision du trait et de recherche de tonalité qu'elle requière.
avant
pendant
après
